LE BETEY
Modeste capillaire qui sourd je ne sais où, ta
courbe est sinueuse et ton cours paresse entre les troncs de charmes allongés
dans ton lit…
Souvent des inconscients, sans respect pour ton âge, souillent sans vergogne de sanies ton passage.
Je frémis de te voir si pollué que les hommes demain
t’auront canalisé, sertissant de béton ta course régulière, te privant à jamais
d’or et de lumière…
Sortant d’abysses oxydés, ton eau ferrugineuse recouvre chaque écueil d’une teinte rougeâtre et ton débit nerveux berce les sagittaires, ondule les rubaniers
Et sur ton passage, la menthe sauvage libère son
parfum…
J’ai vu les trains de marchandises faisant vibrer ta
couche en de petits cercles blancs aussitôt refermés.
J’ai vu les lavandières, sous leur abri de chaume,
frapper de leurs outils des habits de coutils.
Ton eau alors bien claire, rinçait par ton courant
le linge savonné.
Et les cris de ces femmes, faisant si grand lavage, devaient, par toi portés, glisser jusqu’au BASSIN. Et les maris pêcheurs auraient pût écouter, au ras de leurs filets, le gentil babillage de leur douce moitié.
François Veillon